Lettre ouverte à Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la Coordination Intercommunautaire contre l’Antisémitisme et la Diffamation (CICAD)

Cher Monsieur,

Je fais suite à vos propos dans la Tribune de Genève, article du 8 janvier 2023 d’Emilien Ghidoni, titré « À Genève, Dieudonné rend hommage à un pianiste controversé ».

Vous faites référence à une cérémonie organisée par l’Association genevoise des amis de Stéphane Blet, dont je suis le président - la Tribune de Genève n’ayant pas répondu à mon droit de réponse, j’ai décidé de vous adresser une lettre ouverte.

Dans le passage de l’article en question, il est dit de vous : « Il estime que l’association des amis de Stéphane Blet, qui a organisé l’hommage samedi, est assez représentative des milieux bien connus de la CICAD. Leur rassemblement démontre la persistance de ce type de groupe et d’activistes peu recommandables installés à Genève, regrette-t-il. Le terreau de l’antisémitisme existe aussi en Suisse, pour ceux qui en doutaient encore. »

Sur le site de la CICAD, le dernier article est daté du jeudi 12 janvier avec le titre « Dieudonné de retour, à Genève : antisémitisme, racisme et transphobie au rendez-vous » où il est dit, je cite :

« Dieudonné n’aura pas ménagé sa peine au cours de ce week-end, allant jusqu’à participer samedi à un hommage pour Stéphane Blet, musicien reconverti au complotisme et au racisme, décédé à Genève il y a un an. Petite réunion de famille au programme des festivités qui a rassemblé, comme l’indique la Tribune de Genève, une vingtaine d’afficionados. »

Notre association n’est pas antisémite, nous sommes contre toute forme de racisme et surtout, pour une liberté d’expression totale, même celle de nos détracteurs. Je ne ressortirais pas la phrase de Voltaire - qui d’ailleurs était antisémite.

J’ai été, par le passé, président du Centre Kurde des Droits de l’Homme de Genève, que j’ai représenté à plusieurs reprises notamment au parlement européen lors de la 4ème conférence internationale kurde où je me suis exprimé sur les mines antipersonnel et les peines capitales en Iran.

Je ne vois vraiment pas en quoi notre association serait un élément du « terreau antisémite » à Genève. La présence de Dieudonné à notre hommage peut-être ? Dieudonné qui a publié une lettre dans Israel Magazine qui a animé le débat public sur la question de l’antisémitisme. Rien n’est tout blanc, rien n’est tout noir. Imaginez que l’on attaque le Dalaï Lama pour s’être pris en photo avec le criminel de guerre Bush Jr qui est responsable de la mort de centaines de milliers d’enfants en Irak. À ma connaissance Dieudonné n’a fait aucun appel à la haine, au meurtre ou à l’extermination d’une population. Au contraire, il fait des appels à la réconciliation depuis des années, en réponse, je constate un acharnement, des persécutions judiciaires, plusieurs attaques physiques dont une attaque terroriste à son encontre (la voiture qui a foncé dans la scène), un lynchage médiatique dont Dieudonné est victime.

Vous pouvez citer les condamnations, vous verrez dans ces condamnations, bien souvent, des décisions tendancieuses, pour ne pas dire systématiques - je pense notamment au « Mur des cons » de la magistrature, pour ne citer qu’un exemple. Cette France et sa justice qui n’est pas un exemple sur la question des droits de l’homme, tout comme Israël d’ailleurs.

Pour ma part, je suis toujours un défenseur des droits humains et pour ce cas précis, constate que, même mort, Stéphane Blet dérange et subit toujours la persécution médiatique dont il était victime.

Je dirais simplement ceci :

Ne peut-on pas dissocier l’artiste de l’homme dans sa vie privée et ses prises de positions politiques ? C’est ce qui avait été demandé par les partisans de Polanski - qui, lui, était accusé de viol sur mineure.

Je souhaite donc que l’on respecte Stéphane Blet qui ne peut plus se défendre.

Mehmet Yildiz